Salut tout le monde, ça fait bien un an que je me renseigne sur psychoactif mais c'est mon premier post, alors dites moi si je ne fais pas ça bien.
Donc voilà, j'ai décidé de poster le
TR de mon premier trip au L, qui s'est à la fois très bien et très mal passé.
Set & setting :Âge : presque 19 au moment du trip
Poids : 67kg, homme
Substance :
LSD, 200-220ug
Autres :
cannabis sativa
Lieu : différents endroits d'une forêt dans le Val d'Oise, puis chez moi
Voyageurs : deux amis très proches (que nous allons appeler Jésus et Maestro afin de préserver leur intégrité)
Je ne sais pas vraiment par où commencer mais je pense qu'il est important d'avoir quelques renseignements sur les 3 génies que nous sommes.
On a tous à peu près le même âge et on se connaît tous les 3 depuis le collège. Malgré le fait qu'on ait tous trois pris des chemins relativement différents dans la vie, on continue de se voir assez souvent et de très bien s'entendre, malgré quelques passes bien chelou (c'est important pour la suite je crois).
Pour ce qui est de ma petite personne, je suis habitué depuis le lycée à me prendre des races régulièrement, uniquement avec l'
alcool ou la
beuh. J'ai découvert l'
ecstasy pendant l'été 2020 et en ai pris 2 ou 3 fois depuis, ça a été un grand changement dans ma vie : j'ai arrêté d'avoir (trop) peur de la drogue de manière générale et j'ai surtout commencé à avoir envie d'explorer toutes les couches dimensionnelles auxquelles elle nous permet d'accéder.
Côté psychédéliques, très peu d'expérience : j'ai essayé les
truffes deux fois, une première à 7g qui s'est bien passée mais avec des effets pas vraiment impressionnants (quoique relaxants) et une deuxième à 13g avec des
truffes d'une si mauvaise qualité que le trip n'a presque pas eu lieu (merci les promos de chacal chez z*****ia).
En revanche, je me suis énormément renseigné sur les psychédéliques, leurs effets, les risques, etc.
En bref, un psychonaute renseigné mais pas expérimenté.
Pour ce qui est de Jésus, il s'est pris quelques races mais ce qui défonce n'est pas vraiment son truc (jamais fumé, il vomit très vite quand il boit, etc). Je lui ai juste fait essayer les
space cake une fois et il n'a pas vraiment accroché.
Je ne m'attendais pas du tout à réussir à le convaincre pour une perche au
LSD mais ça n'a même pas été très complexe une fois qu'il a appris que personne n'en était vraiment mort.
Vient enfin le tour de Maestro. On traîne moins avec lui depuis qu'on est à la fac (il fait des vraies études pendant que nous on se la touche un peu) et y a deux ou trois fonctions sociales qu'il comprend de travers, ce pourquoi on l'adore. Il a déjà essayé l'exta une fois mais pas trop fort, et quelques races mais assez rarement. Un des grands débats entre nous c'est qu'on pense avec Jésus qu'il fait parfois semblant de certaines choses, du style prétendre que tout va très bien alors que ça part clairement en couille, ou en rajouter quand ça se passe bien parce qu'il a peur d'être exclu du délire (TRES IMPORTANT POUR LA SUITE).
Bref, on a pecho nos trips de L à un dealos adorable, il nous prévient qu'ils sont assez costauds, d'abord un demi voir un quart, tout le tralala. De notre côté, on a acheté un test d'Ehrlich. Le test est positif, on est sûrs de la substance qu'on va prendre. Tous les trois rassurés, on se dit qu'on fera ça une après-midi dans la forêt (que je connais particulièrement bien, un endroit qu'on apprécie tous les trois).
Prise et montée :On se retrouve vers 15h avec Jésus mais, comme d'habitude, Maestro est en retard. Merde, c'était lui le trip sitter. On se dit qu'on va pas attendre son gros cul et on décide de taper chacun un demi toncar vers 15h30. Faut savoir qu'une fois j'ai donné un quart de
taz à Jésus qui n'a rien ressenti, j'ai donc dû le convaincre de se contenter d'un demi
buvard pour l'instant. Il n'était pas très content mais ça allait. L'ambiance est relaxante, il fait beau et on décide de méditer un tout petit peu pour se détendre avant que les effets n'arrivent. Je décide à un moment d'aller taper l'autre moitié de mon
buvard sans le dire à Jésus (je voulais vraiment éviter une perche inexistante comme avec les
truffes). On passe une grosse demie heure à discuter et se taper des barres comme d'habitude mais les effets ne viennent pas. Je lui dis que j'ai tapé l'autre moitié de mon trip, pour qu'il comprenne ce qui m'arrive si je pars en sucette. Je commence à me sentir vraiment détendu, tout en étant relativement excité par ce qui allait se passer. Je savais que ça allait être quelque chose de grand. C'était un moment de ma vie où je n'étais pas au top depuis assez longtemps et je me disais qu'il y allait forcément avoir un moment de bad, voir un
bad trip complet, mais il fallait absolument que je m'affronte moi-même. J'espérais vraiment en ressortir totalement différent, et c'est exactement ce qui allait se passer, mais pas du tout de la manière dont je l'imaginais.
Jésus se plaint de ne pas ressentir les effets. L'idée me vient de prendre mon téléphone, mettre une musique incroyable (No Quarter de Led Zeppelin) et de lui dire de fermer les yeux et de me faire confiance. Je prends la musique et la déplace dans son dos, sa nuque, sur les côtés de sa tête quand soudain il se redresse en me disant d'arrêter, plus surpris que paniqué mais avec un fond de peur.
"Mec ! J'viens de voir des trucs de ouf dans mes paupières !"
C'est parti.
Plateau :De là, je commence à être très heureux de savoir qu'il va découvrir cette substance à propos de laquelle j'ai lu tellement de belles choses. Encore plus heureux de savoir qu'on allait faire ça ensemble, entre potes.
Il a continué à essayer de fermer ses yeux pour retrouver ses visus, il trouvait les nuages beaux, etc. De mon côté, les effets ont mis plus de temps à venir mais j'ai commencé à me sentir très à l'aise dans la forêt (j'ai un amour fou pour la nature). Je décide d'aller me promener un peu et toutes les couleurs me semblent chatoyantes. Le soleil émet des rayons dorés qui rendent l'endroit vraiment féérique en cette belle journée d'avril. Quand je regarde l'écorce des bouleaux et des châtaigniers, il me semble mieux en discerner des détails que je n'avais jamais remarqués auparavant, j'ai pourtant passé des journées entières à observer la nature mais voilà que je redécouvre le monde entier. Tout me paraît nouveau mais extrêmement hospitalier, je me sens vraiment chez moi.
Maestro arrive à nous trouver malgré le fait que l'endroit soit caché. Ca nous fait franchement plaisir de voir sa petite gueule et il a l'air heureux aussi. On lui explique très calmement qu'on a déjà drop nos
buvards et que les effets sont en train de monter, que tout se passe très bien. On reste un peu tous les trois à discuter en faisant des pauses pour observer le lieu changer sous nos yeux. Léger malaise car j'ai la sensation que Maestro nous observe (ce que je ne lui reproche même pas vraiment) mais rien de bien grave. Nous sommes ensuite pris de nombreux fous rires avec Jésus, on apprécie tous les deux énormément l'humour de l'autre en temps normal mais là c'était incroyable. À nous trois on était les meilleurs amis du monde, c'était un chouette ressenti.
Jésus commence à rentrer dans un trip très visuel : des singes descendent des arbres, les nuages prennent des formes de femmes nues (ça le suivra tout le trip), les plantes respirent, etc.
On décide de descendre en contrebas car il croit voir un chimpanzé sur un tronc. Il s'agissait en fait d'une excroissance sur un arbre. Mais en nous approchant, il y voit maintenant une forme de bébé crocodile entouré autour de l'arbre. Moi, j'ai l'impression que la texture de l'excroissance s'anime très doucement. On délire un peu autour de l'arbre puis on va s'allonger avec Jésus. Maestro décide de nous laisser un peu car j'ai toujours le sentiment d'être observé.
Les visus de Jésus semblent assez puissantes, il remarque une traînée derrière une buse qui nous survole, des mosaïques quand il ferme les yeux, etc.
De mon côté, beaucoup c'était beaucoup moins visuel mais je me sentais incroyablement bien, je lui dis que je trouve ça beaucoup mieux que l'
ecstasy alors que c'était déjà super et que je ne comprends pas qu'on puisse faire un
bad trip sous
LSD. J'ai rarement été aussi heureux et apaisé de ma vie.
Mais Jésus commence à doucement me casser les couilles car il n'arrête pas de me dire ce qu'il voit et ça me sort systématiquement des petites visus dont j'essayais de profiter. Du coup, je me mets à dire aussi tout ce que je vois et je me casse les couilles à moi-même. On se dit qu'on arrête de parler et qu'on profite tranquillement de ce qui se passe.
Je me sens toujours très en phase avec la nature et beaucoup de textures prennent des couleurs arc-en-ciel mais plus reflet de flaque de gazole dans un port que véritable arc-en-ciel. C'est tout de même très beau. Les nuages s'animent doucement et semblent s'enrouler autour d'eux-mêmes, si je fixe un point dans les arbre, le monde se transforme en une incroyable mosaïque dont les contours des carreaux brillent et semblent vivants. Jésus me parle mais je n'écoute plus car les trois arbres devant moi se mettent à danser. Il se perd dans son explication et s'arrête. "Tout mosaïque..." dit-il dans un mélange d'étonnement et d'admiration. Pendant tout ce moment que je raconte, on était souvent pris de fous rires, une simple texture qui me semblait étrange suffisait à m'amuser et beaucoup de choses me semblaient très drôles. J'avais l'impression que ça saoûlait Jésus alors j'essayais de me retenir, ce qui n'avait pour effet que de me faire rire aux éclats.
J'alternais pendant toute cette période du trip entre des moments de détente et des moments d'excitation. Lorsque que l'excitation montait, j'avais une drôle de sensation de contraction juste derrière mon palais qui finit par me faire mal, mais sans vraiment foutre en l'air le trip. Ma concentration était portée ailleurs...
Tout allait bien, c'était vraiment la dolce vita. J'avais l'impression que les rayons du Soleil qui perçaient à travers les feuilles vert tendre printanières me caressaient la peau, et que cette caresse devenait de plus en plus sensuelle, presque sexuelle.
"Tu vas rire mais là, j'ai l'impression que le Soleil me baise et qu'il baise très bien".
Maestro revient vers nous. On a l'impression que ce moment vient de durer deux heures au moins alors on lui demande quelle heure il est parce qu'on est conscients de perdre la notion du temps.
"Ah non non non, j'suis parti y a quoi... Vingt minutes ?"
C'est vraiment cool, ça nous laisse du temps pour profiter.
Je donne sa deuxième moitié à Jésus.
On continue dans cette ambiance pendant un bout de temps puis Maestro, à qui on répétait depuis le début qu'il fallait absolument qu'il essaie accepte de prendre son demi
buvard.
On trouve un tas de pierres près du crocodile dans l'arbre et on dit que c'est un autel. On veut faire un rituel mais on ne trouve rien pour en faire un bien. On aurait sacrifié une vierge et bu du sang de biche déguisés en loups si on avait pu.
Il drop son bout et on décide de bouger parce qu'on voulait voir le coucher du Soleil à un endroit précis. À ce moment, il nous reste bien deux heures avant ça mais une petite balade ne peut pas nous faire de mal.
Jésus est à pied, Maestro est encore sobre et moi je suis... à vélo.
Moment IN-CROY-ABLE !
J'avais l'impression d'être une véritable pièce du vélo, comme un gros amortisseur servant aussi de moteur. J'étais étonné de ne pas perdre du tout l'équilibre et je commence à prendre de la vitesse, sauter par dessus des troncs. Je viens de retrouver la sensation des premières fois à vélo, quand on est petit et que le monde est encore beau.
Je viens de retrouver mon enfance.
À ce moment là, j'ai une véritable envie de pleurer tant la joie est grande, et puis en même temps ça me rend un peu nostalgique et ça me fout le cafard. Mais je décide de retenir tout ça, de retourner vers mes potes pour pas les faire bader... Puis les bonhommes ça pleure pas.
On fait un détour par une sapinière proche dans laquelle Jésus voulait absolument aller. L'ambiance change radicalement, c'est plus sombre et on se croirait presque en basse montagne. J'ai perdu la plupart des effets visuels depuis quelques minutes mais pas Jésus. Il trouve ça magnifique. Moi aussi. Maestro aussi, même s'il n'est toujours pas monté.
Depuis quelques temps, je voyais des motifs semblables à des plumes de paon se dessiner un peu partout, qui avaient tendance à se transformer en yeux. Mais pas des yeux qui mettent mal à l'aise. Des yeux discrets, assez difficiles à discerner. Je commence à tout voir de façon légèrement dédoublée, un dédoublement si fin que ça peut sembler un simple floue. C'est bizarre et je ne me sens plus très à l'aise.
On finit par repartir même si Jésus s'émerveille d'absolument tout tous les 2 mètres. Maestro aussi est à vélo et on roule doucement puisque Jésus est à pied mais j'ai très envie d'aller faire une petite promenade. Ils me disent qu'ils restent ensemble et que c'est bon, de faire attention à moi et qu'on se retrouve à l'endroit prévu au moment où le soleil se couche.
Je pars en pédalant comme un fou, la sensation de vitesse est incroyablement exacerbée, ça me chatouille le ventre et je ris à pleins poumons. Le malaise est parti, je vois net et je suis bien.
Le décor des arbres qui défilaient le long du chemin commence à devenir flou, mouvant de lui-même. C'est distrayant mais je me concentre sur ma trajectoire après avoir failli me péter la gueule en matant le décor.
Je m'arrête au bord d'une mare et commence une grande introspection, je pense à ma vie, à ce qui va et ne va pas dans le monde mais je n'arrive plus à suivre le fil de mes pensées et ça m'énerve. Je commence à essayer de toute expliquer, ce qui bloque mon esprit. Je finis par repartir vers chez moi en me disant qu'un peu de
beuh ne me fera pas de mal, qu'il est un peu tôt pour la
descente.
Il faut juste que je lâche prise et que je kiffe de façon simple. Profiter.
Je repars à vélo, c'est toujours amusant mais moins que tout à l'heure. J'arrive chez moi. Le monde me semble quelque peu étrange. J'hésite à rentrer. Puis je me souviens de mon chien (l'amour de ma vie) qui est dedans et qui attend sa promenade du soir.
Merde. Comment j'ai pu l'oublier ?
Je me sens comme quelqu'un de mauvais. Je dis coucou au chien et je monte chercher de quoi rouler. J'ai l'impression de n'être presque plus défoncé. Il est environ 19 heures. Je passe devant le grand miroir de l'entrée en sortant. Pupilles énormes. Je suis encore défoncé. J'ai tout à coup du mal à faire la différence entre moi en perche et moi sobre.
Je sors.
Descente :Je suis tout de même heureux parce que je suis avec mon chien. On marche retrouver mes potes. Il fait beau. Tout va bien.
Je longe un chemin que j'emprunte presque tous les jours, le long duquel se trouve une porte en métal donnant sur le jardin d'une des plus belles maisons du village. J'ai toujours vu la porte fermée.
Là, elle est entrouverte.
Je bug un peu devant, j'hésite.
Puis je me dis que c'est la porte vers un monde extraordinaire, que ça va vraiment me faire quelque chose. Je rentre donc dans le jardin. Il est très beau, la maison est magnifique, une sorte de manoir à la forme originale mais pas tape à l'oeil avec charpente apparente. J'explore un peu puis d'un coup je me dis "écoute champion, t'es chez des gens que tu ne connais pas, il est 19h et t'es sous
LSD..."
Je sors.
En chemin, je m'arrête regarder la texture du mur qui se couvre de légers reflets multicolores si je me concentre, les tags sont flashis. Je continue jusqu'à retrouver mes amis. Ils ont l'air vraiment soulagés de me voir et tout le monde est heureux. J'ai enregistré en audio ce moment-là et ça m'a fait du bien de le réécouter, le dernier bon moment avant le gros bad pour nous trois.
Les couleurs du Soleil qui se couche sont belles mais pas significativement plus que d'habitude. On est au-dessus d'un champ à ce moment-là. Je suis un peu déçu mais je ne le montre pas, ils ont l'air de bien kiffer.
Je me rends compte que je suis parti une grosse heure et que Maestro commence à monter. Il me demande sa deuxième moitié de trip. Je lui donne. Erreur.
"Woahhh Jésus t'as les cheveux verts".
Avec J. on se regarde, on le sait au ton de sa voix, Maestro en rajoute et ça risque de continuer longtemps.
Je roule un
joint en regardant les dernières lumières violacées d'un Soleil déjà couché. La fumée ne me fait absolument pas mal à la gorge, c'est très doux même en grosses lattes. C'est un pur roulé court car je suis le seul à fumer. Il faut savoir que la
weed a souvent tendance à me rendre parano et anxieux mais je veux absolument relancer les effets du L. J'ai conservé une magnifique image mentale de ce moment, avec le dégradé de couleurs oranges-rouges-violettes-bleues du ciel séparées de façon très nette et la lune, alors à son minimum, qui avait la forme d'une paupière fermée dans le ciel, comme l'oeil d'une entité nous dépassant totalement qui veillait sur nous.
On discute un peu en riant avec Jésus mais on est tous les deux fatigués, alors que Maestro monte. Je sens que ça ne va pas le faire. On se fixe un moment et il dit trouver mon visage "divin", que je suis très beau. On rit un coup et puis l'envie me prend de m'allonger dans les plantations du champ, comme si j'allais découvrir un autre monde. Je sens que la
beuh fait bien effet mais ça ne lance pas de paranoïa.
Je me mets à plat ventre dans le champ et je me mets à observer les petits insectes qui y font leur vie, la forme des plantes à leur
base et la surface irrégulière de la terre. Soudain, je me mets à la place d'un insecte. Non pas que j'aie l'impression de devenir l'insecte, mais je parviens à prendre son référentiel de taille. Je me trouve alors énorme, je suis devenu un véritable géant et c'est extraordinaire. Je suis un gentil géant, véritable Gulliver qui ne veut pas faire de mal du tout au monde en-dessous de lui.
Intrigué par mon expression, Jésus décide de faire pareil. Il m'a alors expliqué qu'il a vécu un moment magique, en découvrant lui aussi un nouveau monde, et en voyant des lumières s'élever en partant du sol.
Je sais que ce qui est raconté ici ne ressemble pas vraiment à une
descente, mais j'ai beaucoup de mal à trouver une frontière entre la fin du plateau et la
descente.
Bref, la nuit est tombée et il faut rentrer. J'habite à un peu plus d'un kilomètre et il fait noir. Mais je connais le chemin par coeur.
Là commence la partie très sombre du trip.
Lorsque nous marchions pour rentrer, le temps s'est remis à passer extrêmement lentement, nous donnant l'impression de ne plus avancer. Puis, j'ai eu la sensation que seul le monde bougeait mais que nous étions immobiles. Et qu'il en avait été ainsi depuis le début de mon existence, mais que je venais seulement de m'en rendre compte. À partir de là, tout à commencé à me paraître irréel. Petit coup de flippe quand on s'est mis à entendre un sacré nombre de sangliers remuer dans les fourrés. C'était cool parce que ça nous a remis les pieds sur terre. Mais pas pour longtemps.
En rentrant chez moi, Jésus s'est mis à essayer de trouver des "failles dans la matrice" et à menacer de nous faire peur. Il l'a dit sur le ton de la vanne mais j'ai commencé à douter de lui. Maestro n'arrêtait pas de parler depuis le début du trajet en nous expliquant comment il se sentait mais c'était assez brouillé et ça ne m'intéressait pas du tout, je voulais surtout rentrer chez moi pour retourner dans le monde réel.
De retour à la maison, Maestro devient chelou. Il fait semblant de rester coincé dans l'entrée, prétendant un "mur invisible" (avec un très très mauvais jeu d'acteur). Le chien, d'habitude très calme, se met à lui aboyer dessus. Je m'énerve un peu et le fait rentrer dans la maison en lui disant d'arrêter ses conneries. À un moment où j'essaie de prendre une photo de nous, je n'arrive pas à allumer mon portable. L'écran est noir. Quand j'ai réussi à allumer le téléphone, le monde m'a soudain semblé disparaître, et je ne le voyais plus qu'à travers mon portable. Bizarre mais ça s'est vite arrêté.
On essaie de rigoler un peu mais mon humour ne semble plus avoir d'effet sur eux, et inversement. Je suis pour ma part très sarcastique mais ils se sont mis à prendre aux sérieux tout ce que je disais. Nous étions incapables de communiquer de manière sérieuse ou humoristique. Incapables d'exposer nos idées aux autres, de les comprendre mais aussi de nous comprendre nous-mêmes. On consent alors tous à ne plus essayer de parler aux autres en leur exposant nos idées. Je me suis dit que j'allais mettre de la musique sur mes enceintes et que ça allait nous faire suffisamment phaser pour nous sortir de ce malaise très très pesant. (le trip s'était jusqu'ici passé sans musique).
Je cherche le câble pour brancher le téléphone mais ne le trouve pas. Ce moment dure au moins 30 minutes, qui semblent passer comme trois heures. Je retourne à la table de la cuisine avec eux et nous réalisons que je viens d'aller essayer de brancher la musique deux fois, que c'est la deuxième fois que je me rassois. On est tous les trois dans un bad différent mais on a été d'accord le lendemain pour se dire que chacun considérait les autres comme étant dans le même état que lui-même.
Pour ma part, je perdais totalement le contact avec la réalité. J'ai mangé pour rappeler à quelque chose qui existait. C'était très bon mais ça n'a pas résolu mon problème. Comme à la sapinière, je me remets à tout voir légèrement en double. J'ai l'impression de vivre dans la matrice et que rien n'est réel. Je file au salon et j'arrive à enfin lancer la musique. On éteint les lumières et on écoute ça tranquillement sur le canapé. Un bref éclair de joie me saisit à ce moment : pour la première fois de ma vie, je vais écouter de la musique sous l'emprise d'un psychédélique. Je suis un grand passionné de musique, j'en joue et en écoute énormément. C'est un moment très important pour moi, surtout que les effets sont toujours présents, surtout yeux fermés (bien que peu visuels).
Je lance alors "1983..." de Jimi Hendrix. C'est un morceau qui commence doucement et monte subitement. Maestro lâche un petit "waw" au tout début. Je souris, ça va être chouette. La musique monte et...
"WAAA MEC WOUHOUUU WOWOWOWWWW CEST TROP COOL WAZAAAA"
Ce gros shlag de Maestro, assis juste à côté de moi, couvre la musique avec ses cris débiles. Avec Jésus on l'engueule un coup, surtout qu'on venait de lui dire qu'on l'avait cramé quand il en rajoutait. Mais il continuait. Ce moment était totalement gâché alors on est retournés à la table après le morceau (qui est quand même assez long).
Un malaise pesant est toujours présent. Personne ne fait plus confiance à personne. Jésus dira "j'ai l'impression qu'on n'est plus potes, qu'on se déteste" et j'étais bien d'accord avec ce ressenti. C'était horrible de se retrouver dans cette situation alors qu'on avait tous les trois l'habitude de passer des super soirées ensemble autour de cette même table, totalement bourrés.
À un moment donné de la discussion, je me suis mis à suranalyser la situation et je leur ai dit avoir le moyen de monter celui que je voulais contre l'autre. C'est lorsque Jésus dit à Maestro qu'il se doutait qu'il en rajoutait et que Maestro le contredisait, ils m'ont regardé ensemble avec insistance et me semblaient chacun me supplier de rallier sa cause. Je devais être en plein délire quand j'ai lancé ça mais ça n'a fait qu'accentuer le malaise déjà présent. Je me suis ensuite mis à répondre avec des coups d'avance dans la discussion, en anticipant leur réponse. C'est vraiment parti en couille surtout que c'est eux qui m'en ont fait m'en rendre compte.
Maestro a commencé à avoir très peur. Il me semblait mal à l'aise quand je le regardais. J'ai dû le fixer un bout de temps, ce qui n'a sûrement rien arrangé.
Le seul moment à peu près amusant était quand Jésus et moi nous amusions à relancer les visus en nous concentrant sur quelque chose.
J'ai par exemple regardé son reflet dans la vitre. Son corps a disparu, il ne reste qu'une silhouette noire. Je l'entends toujours parler mais je ne vois que ça dans la vitre. Je ne panique pas car il suffit que je le regarde directement pour que ça s'annule. Sa silhouette noire commence à vibrer aux couleurs arc-en-ciel ternes que je voyais depuis le début du trip. Ses yeux et sa bouche réapparaissent. Mais pas le reste. L'arc en-en-ciel disparaît et laisse apparaître d'autres yeux et d'autres bouches un peu partout sur son visage. On rit mais pas beaucoup. C'est presque forcé. On a le sentiment que plus rien n'a d'importance avec Jésus. On fait l'erreur de le dire. Maestro jette son téléphone en riant. Un peu apeurés, on lui demande pourquoi.
"baH PLuS riEn n'A d'iMpoRtAncE"
Maestro si tu lis ça, pine ta daronne.
Je décide d'aller couler une
douille dans ma chambre. Ils m'accompagnent. Les dessins sur les murs ne nous font pas phaser. On redescend salement et on le sait. L'herbe que je fume est agréable mais les effets pas franchement relancés. On redescend après quelques instants et on se pose à nouveau dans la cuisine. Toujours incapables de communiquer. Je mange. Les mots n'ont plus de sens. On en a tous les trois très marre et on décide d'aller se coucher, que le sommeil sera la frontière de la fin du trip et que demain sera beau.
On avait chacun une chambre puisque mes parents et mon frère nous avaient laissé la maison. Sur le palier de l'étage les séparant, on se prépare à aller se coucher mais Maestro semble de plus en plus terrifié. Il a vraiment peur d'être seul. Je leur dis très solennellement qu'il est temps d'aller nous affronter nous-même. Maestro discute un peu avec Jésus dans sa chambre mais ce dernier finit par lui dire d'aller se coucher.
Je suis déjà dans mon lit et c'est un beau bordel dans ma tête. J'ai toujours l'impression de vivre dans un décor de cinéma et en plus le film est vraiment claqué au sol. J'essaie de trouver le sommeil mais pas moyen. J'ai la sensation que je ne pourrai plus jamais communiquer de ma vie avec personne, que mes interactions sociales, c'était foutu, tout était en train d'être détruit sous mes yeux fermés. J'ai essayé de penser à des belles choses : des endroits que j'aime, une fille qui me plaît, des beaux souvenirs...
Mais ces endroits me semblaient faire partie de se monde irréel auquel je n'appartenais pas vraiment. Mes souvenirs n'étaient pas les miens, je doutais même de l'existence de ces moments. J'appartenais au néant. Impossible de m'apaiser, alors j'essaie de trouver la réponse à une question (dont je ne me souviens plus mais quelque chose d'assez existentiel il me semble). Je me dis que la réponse à cette question m'apportera la paix, que la paix m'apportera le sommeil et que demain allait m'apporter la liberté. La liberté de ne plus être prisonnier de mon cerveau qui était en train de fondre.
Mais je n'y arrivais pas. Mon esprit s'attaque à sa propre logique et je ne peux pas y échapper. J'ai alors laissé une note sur mon bureau, comme mes derniers mots.
"-C'est comme chercher une porte dans une pièce noire composée exclusivement de murs. -Mon esprit s'attaque à sa propre logique. -Autodestruction et ravage de soi."
Sympa le trip, hein ? ^^
Plusieurs heures plus tard (en temps
LSD ça fait environ 2 jours). Toujours cherchant le sommeil, j'entends quelqu'un se lever et aller boire à la salle de bains. Je vais faire pareil pour voir dans quel état est mon pote, me rassurer.
Et là, la bonne gueule terrifiée de mon sacré vieux Maestro, qui a tout de même l'air assez content de me croiser. On se rend compte qu'on vit à peut près la même chose et ça nous rassure, on retourne se coucher.
Je ne me souviens plus du moment où je me suis endormi mais je me suis réveillé assez tôt, vers 8h. Plus du tout défoncé mais toujours ce gros sentiment du décor de cinéma. Je me suis dit qu'une grasse mat' me ferait sûrement du bien, que c'est juste mon cerveau qui doit récupérer. Je me rendors et me réveille vers 10h et des bananes. Les deux couillons sont déjà en bas. Je les rejoins, on tape un bon petit déj' et on se raconte un peu tout ça, ce qui leur permet (il me semble en tout cas) de se remettre un peu de leurs émotions. Surtout Jésus. Il s'en sort bien mieux que Maestro et moi j'ai l'impression.
Parce que depuis le réveil, j'ai toujours cette sale impression de vivre dans un monde en papier mâché.
On ramène Jésus chez lui en promenant le chien. Maestro reste chez moi pour tafer parce que c'est plus calme que chez lui. De la journée, on ne s'adressera presque pas un mot, lui travaillant dans la cuisine et moi cherchant un moyen de retourner dans le monde réel.
Il fût un temps où je m'intéressais beaucoup à la psychologie. Je déteste vraiment les gens qui se permettent de s'autodiagnostiquer après avoir passé quelques heures à lire des articles sur le sujet mais ce qui m'arrivait ressemblait salement à une grosse
déréalisation. N'étant pas psychologue, je n'ai pas la moindre idée de la façon d'y remédier. Je sais qu'en dehors des foncedés ça m'arrivait parfois (rarement) de me sentir détaché du monde de façon désagréable et que ça partait toujours seul.
Mais là, ça ne semblait pas s'en aller et ça commençait à me taper sur le système. J'étais totalement vidé de toute émotion, sans aucune raison de vivre et même pas la capacité d'y réfléchir. La solution est incroyable.
Vers 17h j'me dis qu'il faut quelque chose pour sortir de ça, que ça va vraiment plus. L'
alcool comme toute autre substance me semble être une mauvaise idée. Je réfléchis... bon... j'ai fini par partir me tirer la nouille au calme dans ma piaule et là...
RETOUR DANS LE MONDE DES VIVANTS
Mon dieu ce que ça faisait du bien de se sentir normal. J'avais toujours le cerveau un peu fatigué et j'me sentais bizarre mais le soleil, l'herbe du jardin, le chien, le frigo, Maestro, tout ça c'était réel !
20h je ramène Maestro chez lui et il y a toujours un malaise entre nous, on parle peu mais on arrive quand même à rigoler un chouille.
Je pensais vraiment que le
LSD allait régler mes petits problèmes de ma petite vie mais pas vraiment. J'ai passé des moments incroyables dans le bon comme dans le mauvais et je me souviendrai toujours de cette perche. Tout a fonctionné mais rien ne l'a fait comme prévu, c'est la grande différence entre la théorie et la pratique. Depuis cette prise, au lieu de me sentir un peu moins bien chaque jour, je me sens un peu mieux chaque jour. J'ai remis énormément de choses en question, notamment sur des sujets comme comment profiter du monde, passer du bon temps avec les autres et essayer de mieux comprendre le tout. Je profite mieux de l'univers qui m'entoure, un peu comme un enfant mais pas comme un gogole. J'ai l'impression d'avoir compris énormément de choses un peu trop personnelles pour que j'en parle ici mais aujourd'hui, je ne regrette aucunement d'avoir essayé cette substance, mon seul tracas vis-à-vis du trip étant de ne pas comprendre ce qui a enclenché ce bad (l'herbe, les autres, le passage du jour à la nuit, le changement de milieu...?).
Je réessayerai le L mais pas de la même façon, sans doute en réduisant la dose et en évitant tous les facteurs potentiels du bad qui nous a pris tous les trois.
Je sais que ce
TR est incroyablement long et que la maigre qualité de la prose a peut-être fait décrocher tout le monde, et je ne sais pas s'il a une quelconque utilité, mais si tu m'as lu jusqu'ici merci à toi :)
(désolé si quelques fautes se sont glissées par-ci par-là)