Il faut absolument lutter contre les prises en charges influencées par des idées préconçues qui perdurent :
1) Les patients ne ressentent plus la douleur car les
TSO (méthadone,
buprénorphine) sont des antalgiques puissants.
FAUX
La prise en charge de la douleur n'est pas efficace et pour cause pharmacologique, leur prise unique par tranche de 24 heures. Pour l'addictologue, le manque d'
opiacés est couvert par cette prise quotidienne, le risque est minimisé et la posologie adaptée. En revanche, l'action analgésique de la
méthadone ou BHD ne dure que de 4 à 8 heures. La prise en charge de la douleur est clairement insuffisante.
2) Prescrire un antalgique opiacé peut entraîner une rechute dans l'
héroïne.
FAUX
Il n'existe aucune preuve selon laquelle un antalgique de palier 3 fasse redevenir addict un patient sous
méthadone. La pensée selon laquelle tout patient traité par
TSO doit être tenu éloigné d'un morphinique est préconçue. En revanche il a été démontré un risque de rechute multiplié par 2,3 lorsque la douleur d'un patient est ignorée.
3) Associer
TSO et
opioïde peut provoquer une dépression respiratoire, c'est contre indiqué.
HÉ BIEN NON !
C'est de la théorie, on pense instinctivement qu'associer
opiacés entre eux aggrave le risque de dépression respiratoire. Dans les faits d'après les données publiées, lorsqu'il prend régulièrement son
TSO, le risque pour un patient est faible, du fait de la tolérance croisée entre méta et autres
opiacés. Dans le cadre légal la
méthadone n'est pas contre indiquée associée à un antalgique de palier 3 si elle vise la prise en charge de douleur sévère. En revanche la BHD sera contre indiquée dans ce cas-là au vu du risque d'augmenter la dose d'antalgique tout en diminuant ou stoppant la BHD, l'analgésie procurée étant rarement suffisante.
4) Les plaintes du patient sont un prétexte pour qu'il augmente ses doses.
VIGILANCE
Cette recherche à tout prix d'
opiacés est une idée reçue. Souvent interprétée comme une manipulation, la demande d'un patient de recevoir davantage d'
opiacés doit être prise au sérieux. Une prise en charge insuffisante de la douleur entraîne une souffrance et l'anxiété qui peut en résulter se termine parfois par une rupture du suivi. Sur le plan éthique, cela conduit à une insuffisance de soins, ce qui est inacceptable.
Ces préjugés doivent être combattus, ils freinent un accompagnement efficace qui est un enjeu du suivi addictologique. Des douleurs négligées peuvent avoir des conséquences désastreuses, comme l'arrêt d'un traitement trop tôt. La prise en charge ne doit pas être sous estimée par l'équipe soignante.
Une bibliographie peut les accompagner.
Vu dans "Le Flyer" numéro 60.