Paris, dimanche, 16 octobre 2011
je les retrouve, je sens que je les retrouve. Ces soirs.
Tiens, ils me font tellement flipper que je me sers un whisky, comme ça, pour anesthésier la gène. Pour fluidifier l'écrit, aussi. L'
alcool, anticoagulant de l'encre... J'ai pas trouvé mieux.
En panique. De nouveau. Les mêmes réflexes qui reviennent, les mêmes pensées qui m'assaillent et me voilà de retrouver l'étau de l'isolitude.
Faut dire que ça n'allait pas depuis quelques temps déjà , depuis les vacances à Méco, au Portugal. J'y ai cassé un truc dans mon histoire avec Vince, et pendant un mois durant, nous avons tenté de la raccomoder, en vain. Je suis le dernier étonné de l'échec de notre relation. Nous ne sommes pas parvenu à nous départir de nos rôles acquis pendant la dépression, lui en infirmier modèle, moi en malade pétri de souffrance et d'exclusives. C'était mort.
Quand la vie est revenue dedans mes veines, les mêmes plis, les mêmes faux pas sont aussi réapparus. Le sort en était jeté. Nous nous somme séparés il y a une semaine tout juste, d'un commun accord. Mais dans les séparations d'un commun accord, il y en a toujours un qui est plus d'accord que l'autre. Et cette fois, ce n'est pas moi.
Pendant deux ou trois jours, je crois que j'ai trouvé ça plutôt chouette, de retrouver mon célibat. En début de semaine, pour la première fois depuis que j'ai déménagé, c'est à dire depuis 15 ou 16 mois, je parvenais à prendre mes marques, chez moi, sur le Bassin de la Villette. J'engageais des dépenses importantes, qui sans être somptuaires, signifient à tous et à moi le premier que je m'installe là . Pour un temps.
J'ai aussi retrouvé les chemins de mes nuits fauves, pécho au passage un petit mec de vingt ans mon cadet, une sorte de petit chat, avec lequel j'ai baisé, fort bien, et qui l'espace de quelques soirées m'a apporté ce torrent de tendresse que j'attendais. Dont acte, je m'installais dans ma nouvelle vie de célibataire et tout devait aller bien.
Ma peur de l'abandon, cette garce, cette pourriture que ma mère m'a transmise, n'a pas eu besoin de plus d'une semaine pour reprendre les commandes de mon quotidien. Et me voilà ce soir, des idées sombres plein la tête, et surtout, surtout, je hume l'odeur du vide, ton absence et en miroir mon extrême fragilité.
J'ai envie d'écrire. Non ! Pas envie, besoin... L'autre symptome.
J'ai envie d'un trait aussi. Juste un. Pour me rappeler comment ça fait. Pour écrire plus vite et avoir les idées plus claires, plus grises, aussi.
Alors, ce soir, je me suis cassé. Comme hier. Comme demain je me casserai. Fuir cet isolement, et qu'importe si c'est moi qui l'ai construit, il m'est insupportable. Alors j'ai retrouvé le chemin des bordels, des bas fonds du Paris éternel, pourris.
De nouveau, j'ai filé ma bite à des inconnus, sans doute dans le même état de déreliction que moi. Je les ai croisé, fourré, sans jamais les rencontrer. Je m'étonne, depuis mes 42 ans, de toujours trouver des partenaires de cul potables, quand dans le ghettos, à 30 ans, t'es rangé au rang des vieux.
Pour contrer la garce, la solitude, je m'invente une famille virtuelle avec laquelle je reste en interraction, 24/24, ersatz de toi. Facebook, twitter, grindr, bbz, bears, citegay, gayromeo. je multiplie à l'envi les login pour survivre dans un existence de pseudos, une pseudo existence.
Et pourtant, c'est toi qui me lis, eux qui me parlent, qui ensemble, me tenez, un fil ténu. Mais un fil.
Mes vrais amis, que sont-ils devenus ? Egarés pour la plupart entre l'hôpital Bichat et la Clinique de Saint-Mandé, éparpillés dans les affres des dysfonctionnements de mon cerveau malade, je ne les compte plus que sur les doigts d'une main. Et j'en crève comme j'en veux à ma vieille de ne nous avoir pas appris à socialiser. Faudra que j'en parle au psy. Là , il y a un blème.
Et Myriam, mon toubib, alter alma, qui me somme d'écrire, ce que je vis, ce que je traverse, comme exutoire ou comme traces.
Un autre verre.
Ce soir, rue Saint Maur, au bordel de ma jeunesse, j'ai tenté de te remplacer par son cul. Etrangement, quand ils ont voulu m'embrasser, j'ai fuis alors que tout mon être quémandait de la tendresse, une reconnaissance. Mais lorsque je caressais leur corps, je ne sentais que la peau qui se détachait des os. Ils étaient morts et moi avec.
Alors je suis rentré, vite.
Et Ecrire.
Et oui, un autre verre.
Le retour dans le désert de ma vie va être violent. J'aurai beau lutter contre mes travers, le chemin qui s'annonce sera hard, et je serai seul pour le gravir, alors que j'ai tellement besoin de toi.
Mais il est tard.
Trop tard.
Ecrire encore un peu, puisqu'il le faut.
Mais on se rapproche inéluctablement du dernier acte. Et c'est sans doute aussi bien ainsi.
Merci pour le bonus. J'ai failli y croire.