[LSD+alcool] TR : Première fois sous LSD 

J'ai décidé de faire part ici de mon premier trip sous LSD. C'était en teuf (je sais que ce n'est pas conseillé pour un premier trip psychédélique, mais tout s'est bien déroulé dans mon cas et surtout j'étais bien entourée), à la montagne, perdue au milieu de rien. J'avais bu un peu d'alcool avant, nous avons pris notre dose de LSD vers 1h, 1h30 du matin environ et j'ai eu des effets jusque dans l'après-midi. Je vous décris tout ça en détail plus bas.

- Substances : LSD + alcool
(simple supposition pour le LSD, hélas. C'est bel et bien ce qu'on m'a vendu mais ça n'a pas été testé. Je ne le faisais pas encore à cette époque mais à la lecture de quelques TR qui ne se sont pas passés comme prévu ou ont fini aux urgences à causes de NBOMes vendus comme du L ou autres, ça m’est vite passé le pifomètre.)

- Dosage : supposition entre 200 et 300 μg
(concrètement 2 gouttes « par erreur », ça ne veut strictement rien dire, c'est pas vraiment quantifiable comme ça, mais le vendeur a estimé à 150μg la goutte, donc possiblement 300μg au total, il ne s'agit que d'une supposition, mais j'ai eu deux doses, en somme)

- Antécédents : Première expérience sous psychédéliques. J’ai bu de l’alcool avant de prendre ma dose de LSD, pas mangé. Je ne fume pas beaucoup, même rarement et ce soir-là je n’ai strictement rien fumé. Je ne prenais plus de médicaments à ce moment-là, on m’avait arrêté mon AD (fluoxétine) trois mois avant ça.

- Corpulence : Jeune femme de 21 ans, environ 75kg pour 1m64.

- Set (état d’esprit) : good vibes, de bonne humeur, même carrément euphorique

- Setting (environnement) : Je suis avec ma meilleure amie (A) avec qui nous sommes très fusionnelles, on se connaît depuis 7 ans et on partage nos expériences psychoactives ensemble. En plus de nous deux il y a un gars, un bon pote que je connais un peu, mais pas tant non plus (B), bon délire, on l’a vu 2 ou 3 fois déjà, super chill et rassurant, on rigole bien, quoi. Lui-même ramène une amie d’enfance (C) qu’on ne connaît pas. Et ma meilleure amie ramène un ami (D) qu’elle avait perdu de vue avec qui ils tentent de renouer, mais je ne le connais pas. Je sais que ce n’est PAS la meilleure des idées, mais on décide de prendre du LSD pour la première fois en teuf. C’est une toute petite teuf, environ une centaine de personnes devant le son au grand max, souvent même moins. Dans notre groupe : A, B, D et moi-même prévoyons de prendre du LSD, C s’en tiendra à de la kétamine. Ils savent tous que je n’en ai jamais pris de ma vie, A n’a fait qu’un seul trip sous acide avant celui-là, B et D sont plutôt initiés. On a conclu avec A et B que si je me perds ou que je tourne en bad trip, ils s’occupent de moi, j’ai confiance en eux.

Tous les prénoms ont été changés pour le bien du TR, pour préserver l’anonymat de chacun et faciliter la lecture. A devient Olympe, B devient Damien, C devient Pia, D devient Théo. On m’appellera ici Thaïs.
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22h19 :
On a les coordonnés GPS. On décolle tous les cinq : c'est parti. Nous avons sur nous 6 litres d'eau et une glacière de bières, des biscuits dans le sac à dos. Direction la montagne, Saint-Quelque-Chose-Sur-Je-ne-sais-quoi à environ deux ou trois heures de route. J'ai déjà bu, je n'ai rien mangé depuis ce midi. J'ai bu trois bières (des 8.6, fidèle à moi-même), je suis bien déjà.

01h15 :
On donne la côti aux orga de la teuf, on se gare, on installe un sac poubelle sur le rétroviseur, on est bons. Olympe, Damien, Théo et moi on se regarde tous les quatre, sourire en coin, puis Damien se lance : « On a pas toute la nuit, alors on va chercher du LSD les copains. » (Disclaimer : je le sais maintenant, mais toujours mieux d’avoir son plan d’avance et de pouvoir le faire tester, mais j’étais vraiment insouciante et dans l’ignorance là dessus, oups.)

1h30 :
En deux temps, trois mouvements, on trouve une camionnette blanche où ils proposent du LSD (ça inspire la confiance !). Ils en ont sous forme liquide, donc en gouttes. On leur file chacun 10€ pour une goutte. On donne chacun notre cannette de boisson pour qu’ils puissent y mettre les gouttes de LSD à la pipette, et arrivé à ma cannette, le mec fait tomber deux gouttes sans faire exprès, il rigole et dit qu’il nous l’offre. Je rigole avec lui, un peu perdue dans le feu de l'action, mais je me dis qu’au pire, rien de bien méchant, dans la spontanéité dans laquelle tout se passe et mon état un peu pompette, je laisse faire. Tout se passe bien, on va devant le son, on tape de la patte tranquille, on profite et sur les conseils avisés de mes amis je bois doucement ma boisson, je fais l’effort d’avoir une descente moins rapide que d’habitude. Petit à petit, on finit tous de boire notre breuvage magique.(mauvaise idée numéro quinze : laisser le conducteur prendre du LSD...oops)

2h30 :
Je commence à sentir un léger déséquilibre en moi. Je tombe au sol, je regarde mes amis, ils sont hilares et disent « Ah ! Thaïs est en train de monter je crois ! », je me pose la question intérieurement « Est-ce qu’ils se foutent de ma gueule ? Pas cool les potes... », mais Olympe m’aide à me relever et on rigole ensemble. Nos échanges n’ont ni queue ni tête, mais tout va bien. Je commence petit à petit à sentir des effets, je regarde partout autour de moi, mes amis rigolent de me voir comme ça, ça m’a fait bader vite fait, mais j’ai réussi à les ignorer. Au final je me laisse porter par le son, je danse, mes amis eux aussi commencent à monter. A partir d’ici la montée avance très rapidement, et j’ai eu une sorte de « black-out ». Des événements tellement intenses que sur le moment je n’arrivais pas à les conscientiser ou m’en souvenir. On parle de bien trois ou quatre heures de trip où je me suis déplacée entre le son et la voiture, où j’ai interagi avec des gens mais je n’en ai eu des souvenirs par bribes uniquement les jours qui ont suivi (et grâce à des vidéos ou aux souvenirs de mes amis, j’ai réussi à me souvenir un peu de mon point de vue). Je vais essayer de relater ce qu'il s'est passé du mieux que je peux.

De 2h30 à 4h00 :
[pas beaucoup ou peu de souvenirs, aucune notion du temps pendant ce moment, alors je garde une fourchette large. J'ai retrouvé la semaine qui a suivi les repères temporels approximatifs des événements à partir de 4 heures]

Au dessus des caissons, il y avait pour décorer une structure en carton en forme d’ours polaire, et je la voyais s’animer. L’ours devenait un chien ressemblant de très près à Kéké Laglisse (K.K. Slider) des jeux vidéos Animal Crossing. Le chien devient au rythme de la musique de façon assez fluide un diable, puis redevient le chien. Par moments avec des sons de barrissement (cri de l'éléphant) dans une partie assez mentalcore de la teuf, le chien devient un éléphant avec sa trompe qui tourne en rond faisant l'hélicoptère, je pouffe de rire et je me dis innocemment : « Woah, ils ont pris soin d'animer le décor, trop stylé ! » (j'ai découvert une semaine plus tard que ce n'était qu'une hallucination, en réalité l'ours polaire était une image fixe).

Le temps me paraît au ralenti, puis en accéléré, je ne sais parfois plus où je suis, ni où sont mes amis, je n'ai aucune conscience du temps ou de l'heure qu'il est. Je vois des gens qui s'agitent, de la fumée, je vois des camions, des lumières, j'entends des sirènes...Les secours ? La police ? Je ne comprends rien et je suis complètement perdue. Est-ce que je suis morte et j'assiste comme un fantôme aux secours qui viennent ramasser mon cadavre ? Est-ce que la teuf est finie et je ne serai pas coincée dans une boucle où je suis persuadée d'être au milieu de la fête comme si elle ne s'était jamais terminée ? Je regarde autour de moi et je me demande si les flics vont me choper, si je vais finir en garde à vue ou en cellule de dégrisement juste parce que je suis perchée ? Juste parce que j'ai consommé un produit illégal ? Pourquoi c'est illégal d'ailleurs ? Ça me rend triste d'y penser, mes mes pensées vont si vite, j'aimerais tout noter, tout enregistrer, je pourrais sortir un bouquin de philosophie, je me dis, je serai la nouvelle Aristote ou la nouvelle Socrate. Autour de moi, je ne sais plus ce qui est la réalité, j'ai l'impression de voir la free party se faire en accéléré sous mes yeux sans que je ne puisse rien faire, comme une vidéo timelaspe, je vois les gens arriver et partir en accéléré, jusqu'à ce que dans ma vision il n'y ait plus personne. La terre se craquelle, je vois comme des hexagones de terre au sol qui se séparent montrant sortir comme du magma, de la lave. Suis-je en train de vivre l'apocalypse ? Je ne le vis même pas mal, je n'ai même pas l'impression de faire un bad trip, juste je profite de mes sensations et visions, je vis le truc à fond. D'ailleurs, mais c'est vrai, je suis en train de triper moi ! Une fois que je reprends le contrôle et que je me rappelle que tout ce que je vois n'est qu'illusion, je ne vois plus le magma gronder à mes pieds, la free party me semble normale, il n'y a ni la police, ni les secours, tout va bien finalement.

Olympe me demande de l'accompagner à la voiture, je la suis, par peur d'être seule. Il y a une petite montée rocailleuse entre les caissons et l'endroit où sont les voitures, il y a des cailloux et des ronces sur le chemin, nous sommes à la montagne, pour rappel. Je regarde le sol : grossière erreur, je vois des petites ronces au sol et petit à petit je les vois bouger, elles semblent s'enrouler autour de mes pieds, puis de mes chevilles et me tirer vers le sol, comme des sables mouvants. Je hurle de je tombe au sol : Olympe qui me tenait la main ne comprend pas, elle me dit juste en riant : « Alors tu tombes encore sans raison ? Relève toi, je vais pas te porter ! » Et je lui dit d'un air très sérieux ce qu'il se passe. Que je capte des racines d'une autre dimension qui m'aspirent vers le sol, je ne peux rien faire, je suis coincée. Elle éclate de rire à nouveau et me dit la phrase qui va me sauver : « Thaïs, tout ce que tu vois est faux. C'est ton cerveau qui crée des hallucinations avec le LSD, ce n'est pas la réalité. »Je me dis qu'elle a raison, je n'y avais pas pensé avant, ça me semblait tellement évident, mais j'ai laissé le LSD me contrôler, alors que je suis maître. A moi de reprendre les manettes. A partir d'ici chaque fois que je vois un truc « badant » je me dis que tout est question d'interprétation, si je trouve ça joli, ça le deviendra et ça ne me fera plus peur. Je vois ça un peu comme le « Riddikulus » dans le troisième volet de la saga Harry Potter (je ne suis pourtant pas une grande fan de la franchise et je ne suis pas forcément fan de l'autrice, mais ça c'est une autre histoire, juste je me souviens avoir vu les films plus jeune et cette partie m'a marquée, étant d'une nature assez peureuse depuis mon enfance). J'ai l'impression de jeter un sort« Riddikulus » à chaque fois que je vois un truc qui m'effraie : les ronces qui semblaient m’engloutir, deviennent des ballons de fête foraine, tout va bien, j'avance avec mon amie, je l'accompagne jusqu'à la voiture comme initialement prévu.

Arrivées à la voiture, je fus prise d’une envie irrépressible d’uriner, je l’ai crié et dit en boucle à tout le monde, ma meilleure amie m’a poussée contre un tronc d’arbre, j’ai baissé mon pantalon instinctivevement dans le noir sans savoir où j’étais en ayant totalement perdu mes repères, j’ai fait mes besoins, je me suis rhabillée illico et je suis revenue avec les autres, ils ont ri, heureusement, nous étions dans l'obscurité. J'ai probablement fait mes besoins devant et non derrière l'arbre, tant pis, mais au moins je me suis vidée et on était dans le noir, personne n'a rien du voir, seuls mes amis ont compris ce qu'il s'est passé.

Je suis remontée dans la voiture et j'ai été d'un seul coup obsédée par ma carte de transports en commun de ma ville d'origine. Je la cherchais partout dans mes poches comme je pouvais, je criais partout que je l’avais perdue, je me sentais tellement ailleurs que je ne me sentais même plus maîtresse de mes mouvements, je me sentais bien psychologiquement en soi, mais contrôler mon corps et mes mouvements ça me manquait un peu. Je me laissais porter. j’ai un peu laissé tomber l’histoire de ma carte de transport perdue. J’ai essayé de sortir mon téléphone, je voyais l’écran bouger en quadruple, impossible de la déverrouiller.

Je cherche mes amis, je vois Damien au loin, je l'interpelle, il me salue, tout souriant, lui aussi complètement perché, je ne sais pas sur quelle planète il est, mais il est bien. Je lui demande où sont les autres, il me dit que Théo est à côté, mais Pia et Olympe sont dans la voiture. Je jette un œil en direction de Théo et il a l'air bien perché aussi, il est un peu comme moi au moment où tous se moquaient gentiment de moi au début de ma perche : il regarde partout autour de lui il a l'air paumé. Je lui demande si ça va et il me regarde sous le choc. Il finit par me dire « Où sont les caméras ? On est tous filmés ? La société nous espionne ? »...Ok il nous fait un bad trip, celui qui a le plus consommé de LSD par le passé sans faire un seul bad trip est en train d'en faire un sous mes yeux. J'essaye de lui parler d'une voix rassurante, de le calmer et de lui dire qu'on est en sécurité, je propose aux garçons qu'on aille à la voiture un peu, ce qu'ils acceptent.

Avant d'aller à la voiture, les gars veulent faire une promenade, un petit tour à pied. Je les suis, équipée de ma maglite, ma compagne d'aventures (une grosse lampe de vigile qui sauve mes expéditions en urbex, camping, teuf...). On marche sans savoir où nous allons et surtout sans aucune notion du temps, on dit des trucs qui n'ont pas de sens, un vrai dialogue de sourds, mais surtout on rigole à chaque fois que l'un d'entre nous parle, comme si nous étions les êtres les plus drôles du pays entier. D'un coup au bout d'une vingtaine ou trentaine de minutes, Damien et Théo décident de s'arrêtent simultanément pour pisser. Ils le disent, je m'éloigne d'eux, j'éteins la maglite et je leur crie en riant : « Les gars, on est au milieu de rien et j'suis là quoi, merde c'est chiant ! » Ils me disent dès qu'ils ont fini, et on repart. Je sens que mon téléphone vibre et je vois que Olympe m'appelle plusieurs fois mais je n'arrive pas à décrocher : de toute façon on va en direction de la voiture, on arrive bientôt. Et le temps c'est quoi de toute façon ? « Bientôt » qu'est-ce que cela veut dire ?

4h30 :
Une fois arrivés à la voiture, on toque à la fenêtre doucement. Pia qui essayait de dormir râle un peu et Olympe râle aussi car il fait froid et elle se plaint de ne pas être dans le même état, de ne pas vivre une perche aussi intense que comme nous alors qu'elle a pris du LSD au même gars. « Ouais trop nul, j'suis pas montée, j'ai pas d'hallu comme vous, il fait froid, j'veux rentrer les gars, ça m'saoule. ». Je lui dis gentiment que ça va aller, tout va bien, mais je ne peux m'empêcher de rire, le LSD me provoque des fous rires si intenses que Damien me demande si je n'ai pas mal aux abdos. Finalement, Olympe rigole avec Damien et moi, on dit des trucs sans queue ni tête, je comprends que mon amie est aussi perchée que nous, juste elle n'a pas trop d'hallucination visuelles, normal, le LSD est avant tout mental, ma foi. Nous rentrons dans une boucle temporelle dans la voiture. On s'assoit tous à une place, puis Damien dit : « Et on tourne ! », sans comprendre, on suit son ordre, comme si on ne pouvait s'en empêcher : on échange tous de place dans la voiture, dans le sens des aiguilles d'une montre. Pia qui somnolait et Théo qui était perdu n'ont pas l'air de trop comprendre, mais suivent le mouvement, un peu forcés par nous autres. J'étais derrière à droite, puis j'ai été au milieu, et tout le monde a suivi. Olympe crie à son tour : « Allez on tourne ! », je me décale à nouveau. Damien réitère, je finis sur le siège conducteur, on explose de rire, on ne sait pas pourquoi est-ce qu'on fait ça, mais on continue ainsi de suite jusqu'à ce que j'arrive à ma place initiale. Je demande l'heure : environ quatre heures du matin. Je me rends compte que je n'ai eu aucun repère temporel depuis presque trois heures. Je n'ai donné aucune nouvelles à ma sœur ou à mon copain qui sont au courant de ce que je suis en train de faire, mais j'essaye de déverrouiller mon téléphone, en vain. Je vois tout en quatre sur l'écran de mon portable, c'est affreux, je n'arriverais pas à taper le code, tant pis. Je fouille mes poches et je crie à Olympe : « Merde ! J'ai perdue ma carte de métro, j'suis sûre, ma poche de veste est vide...Putain... » Mon amie rigole et me dit que c'est pas le moment d'y penser, elle est sûr et certaine que je l'ai ailleurs, dans mon sac quelque part, et au pire, c'est une teuf, les gens la trouveront et feront une annonce des objets trouvés le lendemain. Je passe une bonne heure comme ça, obsédée par la supposée perte de ma carte de transports, pour finalement plus d'une heure après la retrouver bêtement dans mon sac en cherchant une lampe. Tout le monde s'est arrêté de parler et a éclaté de rire en me voyant avec ma carte de transports dans la main. Tout est bien qui finit bien, mais bon, on a un trip à poursuivre, au moins j'aurai ça en moins à penser.

5h00 :
Revenons en un peu au décor, et à sa mascotte d'ours qui sous mes yeux se transforme en chien, puis en diable : au bout d'un moment lorsqu'on arrive au diable, ses sourcils s'épaississent et se froncent, ses dents me semblent terrifiantes d'un coup. Les lumières deviennent toutes rouges et mon cerveau se met à penser « Est-ce que je suis au milieu d'une secte sataniste où nous restons tous debout devant le diable à l'acclamer en tapant du pied ? » Je lève les yeux et je vois dans le ciel comme une aura blanche dans le lever du jour, est-ce le paradis ? Je ne suis pas croyante, bordel, mais si une divinité quelle qu'elle soit existe,  je suis une personne bien ok ?

6h00 :
Le matin commençait à pointer lentement le bout de son nez. Je n'arrivais toujours pas à déverrouiller mon téléphone mais simplement à lire vaguement l'heure sur mon écran verrouillé en me concentrant et en plissant les yeux. Jusqu'à sept heures du matin environ et l'aurore était si belle. Ma perception du temps était encore complètement altérée. Le temps était cette fois-ci plutôt accéléré, alors je voyais le jour se lever comme si le ciel se vêtissait d'une robe de lumière orangée, c'était l'une des plus belles choses que j'ai pu voir dans ma vie. J'ai demandé à quelqu'un à proximité de déverrouiller mon téléphone pour moi, que je puisse filmer ce spectacle d'une beauté sans nom. Le jour semblait aspirer la nuit, la musique créait des ondes et des vagues, c'était incroyable. J'ai verrouillé mon téléphone et j'ai continué à profiter de ce spectacle : un lever du jour en hiver à la montagne, c'est beau, mais le tout sous LSD à la cinquième heure de trip, quand je commençais à reprendre un peu contrôle de moi-même tout en profitant pleinement des hallucinations visuelles, c'était un rêve éveillé. Je me sentais profondément bien.

7h30 :
Le jour se lève encore, je suis devant les caissons en train de danser depuis des heures avec Damien et Théo. Je demande plusieurs fois où est Olympe, et est-ce qu'on devrait pas aller la voir. Damien me répond en me disant "Faudrait couper le cordon, non ? Tu es trop attachée et dépendante d'elle, allez profite un peu !" Cette phrase aura eu un énorme impact sur ma personne.Notre cher conducteur suggère quelques minutes plus tard qu'on aille chercher les filles dans la voiture. On vient les retrouver, elles râlent un peu, ce qui est légitime : l'une essayait de dormir, l'autre déprimait de ne pas avoir trop d'effets et trois clowns perchés arrivent morts de rire en titubant les déranger. Olympe finit par accepter de nous suivre au son, enfin avec une phrase légendaire prononcée par Damien qui est restée, qu'on dit encore aujourd'hui : "Allez, on va au son !".

10h00 :
Olympe et Pia sont un peu sorties de la voiture, ça va un peu mieux pour elles. Je rigole avec Olympe, ma meilleure amie de toujours, on marche à travers les herbes sauvages. Elle me dit qu'elle a eu un trip plus mental que hallucinogène, je lui dis que c'est possible, le LSD est surtout mental après tout. Olympe me dit "Je suis sous antipsychotiques, peut être que ça y joue...?", j'acquiesce. On s’arrête sur une feuille au sol en se disant "F-E-U-I-L-L-E avec deux L comme nous deux sous L", on répète cette phrase en rigolant, on a l'air bêtes, mais on s'en fiche, pour une fois dans ma vie je me fiche du regard des gens, c'est pas beau ? On marche encore un peu autour du son, puis on repart. Olympe est de meilleure humeur malgré la météo hivernale, le soleil pointe le bout de son nez, c'est déjà mieux que hier soir. On va devant les caissons toutes les deux, nous nous allongeons au sol et on discute de nos hallucinations restantes, elle me dit qu'elle n'en a pas eu beaucoup, mais qu'elle se sent bien, elle profite de l'instant présent, nous philosophons à deux sur la beauté de notre amitié commune depuis toutes ces années. J'arrive à déverrouiller mon téléphone et je prends une photo emblématique : mon selfie sous LSD, où je suis tellement floue que je ressemble à un fantôme, avec le ciel qui est très net en fond avec de beaux nuages cotonneux. Encore mieux : je fais une grimace malgré moi et je suis mal cadrée, je dois occuper 20% de la photo, j'ai failli faire tomber mon téléphone en prenant la photo, ça se voit. Cette photo, on en parle encore, presque un an après les événements.

12h00 :
Je commence à avoir de moins en moins d'hallucinations visuelles, mais je vois toujours un peu l'herbe danser, ma perception du temps est modifiée et je rigole encore pour pas grand chose. Je vois les buissons et les arbres au loin qui tournent sur eux-même sur un pattern de losanges divisés en quatre. On se roule au sol et on rigole avec Olympe, puis on se lève et elle se met à danser comme les Brutocollinus du jeu-vidéo Genshin Impact lorsqu'ils attendent pour attaquer, elle me demande de la filmer et je m'exécute, un énième fou rire et ça continue. Je voyais comme des gros pixels en losange qui tournaient en boucle, comme une sorte de kaléidoscope en quatre parties. Je voyais les brins d’herbe danser et se reproduire en boucle, les nuages former des petites boules de coton qui tournoyaient et les champs au loin bouger de manière étrange.

14h00 :
Encore des fous rires, on revient un peu dans la voiture avec ma meilleure amie, elle trip sur une mouche contre la vitre et elle en imagine les dialogues, nous sommes tous hilares. De mon côté, je croyais ne plus avoir aucune hallu, mais je vois encore des motifs géométriques se créer dans ma vision à partir de tout et de n'importe quoi. Je phase sur le toit de la voiture depuis l'intérieur de celle-ci, l'espèce de tissu gris pelucheux me fascine et mon cerveau sous LSD crée des formes d'une précision inouïe, de couleur arc-en-ciel, avec des couleurs qui n'existent carrément pas dans le monde sobre, des angles et courbes très précis, des formes animées qui me paraissent être d'une logique implacable, alors que je ne sais même pas faire un carré parfait sobre, tout est si beau. J'ai appris plus tard que ce genre de formes, on les appelait des fractales et c'est exactement ça que je voyais : « figure dont la structure est ramifiée à l'infini et présente une inépuisable variété et une infinie complexité. C'est un objet mathématique ou une forme complexe, dont la création trouve ses règles dans l'irrégularité ou la fragmentation. ». Fascinant les fractales.

16h00 :
On commence à s'inquiéter à propos d'une chose essentielle qui aurait du nous frapper plus tôt. Notre conducteur, il a lui aussi pris du LSD hier soir et il carbure à l'alcool depuis tout ce temps. Il avait une glacière pleine de cannettes de bières à l'aller, et nous constatons en un bref coup d'oeil dans la malle qu'il n'en reste même pas cinq...Purée, ce que j'étais innocente hier de lui avoir dit « Cool tu vas partager ça avec du monde, non ? » et de ne pas avoir compris quand il a ri en réponse...On est sensés partir bientôt, au grand max dans une heure ou deux. Je m'en veux, car, certes il a déconné, mais j'aurai pu tilter plus tôt ? Niveau LSD, perso, je me sens très fatiguée, j'entends encore des sons, je vois encore des fractales et lumières, mais je suis somnolente : je peine à rester éveillée, mais je n'arrive pas à m'endormir. Que fait-on ? Nous discutons sans Damien, avec les autres passagers. Pia qui est pas mal restée dans la voiture et qui est relativement sobre, sa dernière trace de ké date de la veille, elle s'est pas mal reposée, faut juste pas qu'on se fasse contrôler, mais Damien ce serait pire encore si on se fait contrôler et en plus nous avons de sérieux risques pour nos vies. Pia a le permis et connait depuis l'enfance Damien, elle essaye de le convaincre de la laisser conduire, elle lui dit qu'il est trop con, qu'il risque pas que sa vie mais celle de quatre autres personnes. J'observe la dispute, silencieuse, les yeux mi-clos, je n'arrive pas à parler, mais j'entends tout, je vois tout. Damien rigole comme un grand-père ivrogne, il dit que « ça va », que « il va gérer » et « qu'il ne laissera pas un kétosaure conduire ». J'ai trouvé ça pas super cool de sa part, je ne l'ai jamais vu dans un tel état et j'étais perdue. Je suis à 3h de route de chez moi, en redescente de LSD coincée avec un mec bourré qui veut absolument prendre la route et à l'arrière, les autres (Théo et Olympe) sont carrément endormis. Utiliser le terme « kétosaure » pour la blâmer sur sa conso de ké, j'ai trouvé ça pas ouf, qui plus est. Super ironique vu son taux d'alcoolémie et son état. Elle était bien redescendue, elle avait dormi et lui il continuait de boire alors qu'on lui demandait de décuver, quitte à passer la nuit ici et rentrer le lendemain, tant pis pour ceux qui travaillent : la vie sauve avant tout.

18h00 :
On a attendu deux heures avant de décoller au final. Damien a refusé que Pia prenne le volant, mais elle veille sur sa conduite depuis le siège passager. Olympe et Théo dorment encore profondément, on les a juste secoués au départ pour leur dire qu'on partait, ils ont acquiescé avant de se rendormir et quant à moi, je reste en hypervigilence malgré mon épuisement : je tiens à surveiller le trajet, voir ce qu'il se passe, vu l'état du conducteur.

21h00 :
Bon, on est rentrés vivants, au fait, mais ce n'était pas une bonne idée de rentrer avec un conducteur dans un tel état, j'aurai du plus m'imposer, et on aurait du attendre le lendemain, mais les choses sont faites, c'est du passé. Théo et moi prenons le bus ensemble pendant 10-15 minutes pour rentrer chez nous. On s'est rendus compte qu'on avait du trajet en commun : lui prend une autre correspondance après, mais moi à la fin du trajet je suis chez moi, enfin. On est déchirés et ça se voit. Grosse redescente de LSD, on a du ping, on est à l'ouest, rien que scanner notre carte de transport, c'est compliqué. Petite parano, on regarde tous les deux autour de nous. Je me dis "Purée, ça doit se voir que je suis perchée, la honte un peu, les gens nous fixent..." Mais je me raisonne : c'est un trajet court, on va pas nous dénoncer à aucune instance et c'est bientôt fini, je suis encore en redescente de LSD, je dois être parano, rien de grave.

22h00 :
Je suis totalement décalée, épuisée, j'ai l'air d'un vieil ordinateur qui a du lag, qui rame. Je me prends tous les murs de mon appartement et j'ai quelques hallucinations auditives encore. J'entends le son de la teuf dans ma chaudière alors je colle mon oreille dessus par moments pour comprendre, heureusement que je vis seule... Je prends une douche, je me fais des nouilles instantanées que je mange en en mettant partout, puis je finis par m'endormir.

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Le lendemain, vers 11 heures :
J’ai enfin repris mes esprits. J’ai enfin repris contrôle de moi-même. On est lundi matin, mais samedi soir j’étais à la montagne à plus de deux heures de route de chez moi en free party à la montagne, et j’étais sous LSD. Mon premier trip sous acide. Je prend le maximum de notes que je peux habituellement quand je teste une substance, mais cette fois-ci, cela m’a semblé impossible. J’ai tenté du mieux que je pouvais de prendre des notes mentalement en me répétant des phrases mais là encore à tout moment j’ai oublié des éléments depuis, bien que tout ça soit arrivé hier, et j'ai vite compris que rédiger un trip report complet me demanderait les souvenirs de mes amis, leurs vidéos et un peu de temps. Je poste ce Trip Report presque un an après les événements pour vous dire. (précisément 9 mois après...un beau bébé !) Heureusement  je n'avais pas cours le lendemain et je ne travaillais pas : je n'aurai pas été en état. J'ai passé la journée à dormir et regarder des vidéos qui ne demandaient aucune réflexion.

Conseils à moi même pour les prochaines fois : avoir un vrai Sam, quelqu'un de sobre un minimum, ou qui accepte de dormir, décuver avant de prendre le volant et s'il peut être Trip Sitter aussi, ce serait pas mal. (j'ai validé ces deux critères sur mon trip suivant, au passage)

Fun Fact : Une semaine plus tard, j'ai demandé à mes amis présents durant la teuf si le décor d'ours en carton était animé, ils ne comprennent pas ce que je veux dire, sont un peu étonnés, puis ils éclatent de rire, j'ai ainsi découvert que ce n'était qu'une hallucination.

Bilan : Avant ce premier trip, j'étais très dépendante de mon amie nommée ici Olympe (nom d'emprunt, je le rappelle). Elle reste toujours ma meilleure pote, j'adore toujours faire des trucs avec elle, mais j'ai appris à être plus indépendante. J'existe sans elle aussi. La phrase qui m'a le plus marquée dans mon trip c'est Damien qui m'a dit : « Faudrait couper le cordon », quand je cherchais partout mon amie. Ce trip m'a aussi apporté des réflexions personnelles sur le temps, la vie, l'existence et l'absurdité de rendre la plupart des substances psychoactives illégales. Cette année, je me suis rendu compte que je n'ai eu AUCUNE période de dépression. Habituellement j'en fais au moins une, voire il m'est arrivé de passer l'année entière ou plusieurs années en dépression, par le passé. Je souffre de dépressions régulières, depuis l'enfance, même le psychiatre qui me suit était étonné que cette année je ne rechute pas. Je ne sais pas si j'intellectualise la chose, mais j'ai le sentiment que c'est lié à mes deux trips sous acide que je me suis autorisé cette année, ainsi que mon entourage bienveillant que je me suis créée petit à petit depuis un an et demi. Bon ce n'est pas un usage médical, c'est pas encadré du tout et clairement récréatif, à tout moment ça aurait pu finir en bad trip, mais tout s'est bien passé et j'ai l'impression que ça m'a permis de réfléchir à certains de mes problèmes, les voir sous un autre angle et carrément m'éviter de replonger.